Climatisation et écologie : que faire pour limiter les risques sur l'environnement ?

Summertime ☀️ En tant que “Nakoum”, animatrice du Challenge Environnemental Energic, je sensibilise en ce moment nos communautés sur l’usage de la climatisation. Quand on regarde la répartition des consommations d’énergie des bâtiments tertiaires, la climatisation prend en effet le relai du chauffage en hiver. Je me suis posée ces questions : À quel point exactement ? Est-ce de pire en pire avec ces étés chaque année plus chauds ?

En faisant mes recherches, je me suis surtout rendue compte que le problème était bien plus global que nos bâtiments tertiaires européens : selon l’IEA (Agence Internationale de l’Energie), près de 20% de l’électricité consommée par tous les bâtiments confondus est lié à la climatisation, au niveau mondial. Le constat actuel mérite déjà que l’on s’y intéresse, mais les prévisions sont alarmantes.

"Le monde est confronté à une crise du froid imminente." Agence Internationale de l’Energie

Serait-ce l’iceberg qui cache la banquise ?

L’IEA, annonçait en préambule de son étude (2018) : “Le monde est confronté à une crise du froid imminente”. Si ce secteur est laissé pour compte, la demande en énergie pour la climatisation aura triplé d’ici 2050 pour atteindre la consommation électrique actuelle de la Chine. Alors que les progrès réalisés sur l’efficacité énergétique dans de nombreux domaines se font sentir, l’IEA tire la sonnette d’alarme pour la climatisation.

Peut-être parce que je sais me passer de climatisation (merci le Noooord #Lille !), je ne m’étais pas rendue compte de l’ampleur du sujet au niveau mondial. Je vous propose donc, vous aussi, de prendre un peu de hauteur pour comprendre les enjeux, découvrir les solutions et, pourquoi pas, faire connaître le sujet de la climatisation à votre entourage.

Pourquoi l’usage de la climatisation s’apprête-t-il à exploser ? Quelles sont les conséquences pour le climat et les besoins énergétiques ? Comment rectifier le tir ? Comment agir à mon échelle ? Ce sont les questions auxquelles je vais tenter de répondre 😉

Des enjeux pour l’énergie et le climat

Le chauffage était notre centre de préoccupation énergétique : le réchauffement de la planète change la donne. Le chauffage représente en moyenne 50% des dépenses énergétiques d’un bâtiment tertiaire. Cette part dominante explique les efforts qui ont été réalisés pour réduire les consommations énergétiques des bâtiments, via le chauffage. En parallèle, le besoin énergétique pour la climatisation augmente… en Europe certes, mais surtout en Chine, en Inde et en Indonésie qui vont concentrer à eux trois, la moitié de la croissance attendue dans ce secteur. La climatisation n’a pas encore bénéficié des avancées faites sur le chauffage. Ou du moins, une grande disparité existe entre les climatiseurs mis sur le marché dans le monde par rapport à leur efficacité énergétique : en moyenne, les gens achètent des climatiseurs 2 fois plus consommateurs d’électricité que ce qui existe. À ce stade, des réglementations seraient certainement nécessaires pour tirer vers le haut la qualité des appareils vendus.

3 facteurs convergent vers une situation non soutenable

L’augmentation de l’usage de la climatisation entraîne l’augmentation des gaz à effet de serre.

La crise climatique a pour effet le réchauffement de certaines régions du monde, qui les entraîne à se tourner vers plus de climatisation (ce qui se comprend soit dit en passant, puisque travailler à température décente permet le développement du pays). Or, la climatisation n’est pas sans conséquence sur les gaz à effet de serre qui réchauffent la planète. Oui, c’est le serpent qui se mord la queue 🐍

Quel rapport entre climatisation et gaz à effet de serre ?

1 - Comme en hiver avec le chauffage, les vagues de chaleur entraînent des pics de consommation énergétique pour climatiser. Dans ces moments-là et pas simplement en France, la production d’électricité est davantage carbonée par la réquisition d’énergies fossiles.

2 - Les fluides frigorigènes utilisés pour refroidir l’air ambiant ont un Potentiel de Réchauffement Global (PRG ou GWP en anglais) bien supérieur au tristement célèbre CO2. Par exemple, le R422 A a un PRG 4143 fois supérieur au CO2. Autant dire que pour atteindre les objectifs environnementaux mondiaux, le chemin est encore long. Mais les réglementations vont dans le bon sens, je vous en parle un peu plus loin.

NB : Les climatiseurs ne rejettent pas les fluides frigorigènes comme les pots d’échappement laissent échapper des gaz à effet de serre, heureusement. En revanche, ils sont sujets aux fuites s’ils sont mal entretenus ou de mauvaise qualité. Le système de climatisation de votre entreprise est-il révisé régulièrement ?

🤯 La concentration des climatiseurs en ville réchauffe les rues ! C’est le résultat de l’étude menée par le CNRS et Météo France en 2012. Le centre-ville serait plus chaud de 0,25 à 1°C à cause de la climatisation des intérieurs.

Climatisation et environnement

Concrètement, quel impact pour le bilan carbone de mon entreprise ?

On ne va pas se mentir, faire le constat de la situation globale peut geler toute motivation à agir localement, surtout comparé aux États-Unis qui connaissent des climatiseurs dans la majorité des logements, et ce depuis longtemps : En 2016, la consommation énergétique des États-Unis pour la climatisation des bâtiments a atteint 1 880 kWh par habitant, soit 6 fois la consommation annuelle d’un grand réfrigérateur. Cela paraît démentiel, mais les États-Unis plafonnent quand la demande augmente ailleurs, notamment en Europe, où les foyers s’équipent à chaque nouvelle vague de chaleur. Il est trop tôt pour en tirer des conclusions, mais l’augmentation du télétravail ne va-t-elle pas aller de pair avec l’équipement des foyers ? Si le télétravail a des avantages écologiques par ailleurs (mobilité, diminution du gaspillage alimentaire…), il démultiplie les lieux à climatiser.

Cette donnée ne se voit pas dans les factures d’électricité de l’entreprise, mais elle n’améliore pas son bilan carbone global pour autant. Pire encore, les collaborateurs risquent de faire comme beaucoup : acheter un climatiseur dès le premier coup de chaud (c’est important de travailler dans de bonnes conditions !) tout en regardant la dépense immédiate. Résultat ? Tous les climatiseurs achetés par l’ensemble des collaborateurs seront en moyenne bon marché impliquant une consommation énergétique élevée et des risques de pollution liés aux fluides frigorigènes plus importants.

👉 La sensibilisation auprès des collaborateurs est clé pour améliorer le bilan carbone de son entreprise. Découvre comment Energic s’y prend pour sensibiliser de manière ludique.

Que peut-on faire pour limiter notre impact sur la climatisation ?

Puisque l’avenir de la climatisation va se jouer sur les pays en développement, pourquoi s'embêter ?

Il n’est pas trop tard pour rectifier le tir, et il est même urgent d’agir. Plus le problème est lointain, moins nous sommes enclins à agir. Toujours la même rengaine… Rappelons-nous simplement que nous vivons tou.te.s sur la même planète et que nos actions ont un impact (souvent indirect) même de l’autre côté du globe. En réduisant de toute urgence mon bilan carbone personnel, j’aide à éviter le +2°C de réchauffement global qui sera vécu de manière plus violente dans les pays (déjà) chauds.

👉 Depuis avril 2020, il est possible de calculer son bilan carbone dans l’application Energic (Tribu). Vous pouvez aussi découvrir comment prendre conscience de l’impact de ses actions du quotidien sur l’environnement grâce au bilan carbone.

Ensuite, tout consommateur a un pouvoir. En ciblant certains achats, et en en évitant d’autres, on pousse les fabricants à agir. Plus les consommateurs (particuliers ou professionnels) sont alertes et choisissent des solutions écologiques et durables, plus on aide les entreprises à monter en gamme et à développer des solutions alternatives comme les bioclimatiseurs, le puits canadien etc.

Par exemple, le lobby du béton a tellement bien fonctionné depuis l’après-guerre que les bâtiments en béton sont devenus la norme alors qu’ils rendent la climatisation nécessaire. Pourtant, d’autres matériaux et modes de construction existent, et ce, depuis bien longtemps, notamment dans les pays chauds. Ils permettaient une meilleure inertie thermique, quand le béton est associé à une image de modernité. Aujourd’hui, ⅔ des constructions dans le monde sont en béton armé. Aller à l’encontre de cette généralisation et associer les politiques permettront la transition.

le lobby du béton a tellement bien fonctionné depuis l’après-guerre que les bâtiments en béton sont devenus la norme alors qu’ils rendent la climatisation nécessaire

Évolution des réglementations sur les fluides frigorigènes : votre entreprise a-t-elle un train d’avance ?

Suite au protocole de Montréal en 1987, les premiers fluides frigorigènes ont été interdits: les CFC et HCFC, afin de protéger la couche d’ozone. À l’époque, les HFC, encore très utilisés aujourd’hui, n’avaient pas été interdits car leur action sur la couche d’ozone est limitée. En revanche, ce sont de puissants gaz à effet de serre. Le protocole de Montréal en 2016 y remédie : 197 pays acceptent de réduire leur utilisation progressivement. Selon le niveau de développement et les températures moyennes du pays, cette action commence entre 2019 et 2028. L’objectif est d’éviter 80 milliards de tonnes de CO2e d’ici 2050.

Cet accord s’est décliné en Europe avec la réglementation F-Gaz entrée en vigueur en 2019 qui interdit par étapes la majorité des fluides frigorigènes HFC en 2020, 2025 puis 2030 selon leur PRG. Ne seront autorisés après 2030 que les fluides ayant un PRG inférieur à 150 et les fluides frigorigènes naturels comme le CO2 (PRG de 1, si vous m’avez suivie) ou l’ammoniac (NH3). 2030, c’est demain ! Alors, votre entreprise a-t-elle un train d’avance ?

👉Pour en savoir plus sur la F-Gaz : https://www.greentechjournal.fr/reglementation-f-gaz/

La sensibilisation sur la climatisation devrait-elle faire partie de la stratégie RSE des entreprises ?

Climatisation et écologie, que faire pour limiter les risques sur l'environnement ?

Si la réduction des consommations d’énergie fait clairement partie des stratégies RSE, la manière dont le plan d’action est décliné est parfois plus floue. Une équipe en charge de la gestion du bâtiment peut être missionnée avec un budget pour des investissements techniques. Est-ce que vos collaborateurs sont au courant des actions mises en place ? La RSE, pour beaucoup, semble loin de leur quotidien et les solutions techniques mises en place, bien que nécessaires, sont encore moins connues. Dommage, lorsqu’on sait que la Responsabilité Sociétale des Entreprises peut être un formidable levier d’engagement des collaborateurs.

Pourtant, le comportement des collaborateurs au bureau peut améliorer le bilan carbone de l’entreprise jusqu’à 25%. Mieux, certaines personnes sont engagées dans leur sphère personnelle et n’attendent qu’à se révéler dans le milieu professionnel. L’Ifpeb, suite à une étude sur plus de 2 ans, donne un terme pour ces profils : les transféreurs et les transféreuses. Ces personnes transfèrent leurs pratiques environnementales, le plus souvent de la maison vers le bureau, notamment dans les domaines des déchets, de l’alimentation et de la mobilité. L’énergie, thème moins concret, est plutôt sujet à un transfert dans l’autre sens : du bureau vers la maison.

Avec l’augmentation du télétravail, l’entreprise ne devrait-elle pas accompagner les collaborateurs sur l’adoption des éco-gestes qui permettent de réduire leur facture d’électricité ? Je suis convaincue qu’en observant un engagement de leur entreprise pour la transition environnementale, les collaborateurs trouvent plus de sens et sont encouragés à faire leur part également. En animant le Challenge Environnemental Energic au sein des entreprises, je remarque que les actions réalisées par l’entreprise sont mal connues des collaborateurs alors qu’elles mériteraient vraiment de l’être. Le Challenge permet d’améliorer ce lien, et surtout, nous encourageons les services qui agissent (RSE mais pas seulement ! ) à s’exprimer sur leurs projets en cours ou réalisés depuis l’application ou via le carnet de bord de leur Challenge.

Voilà comment un sujet tel que la climatisation, technique de prime abord, peut créer du lien entre stratégie RSE et collaborateurs :

  • Vulgariser pour rendre le sujet accessible.
  • Expliquer comment agir avec les bons éco-gestes et aider les collaborateurs à adopter de nouvelles habitudes.
  • Partager ce qui est réalisé au sein de l’organisation pour amplifier l’impact et motiver davantage.
  • Valoriser et fêter les résultats grâce à l’évaluation des progrès réalisés.

👉 À lire sur le même sujet : Télétravail Responsable : top 5 des éco-gestes simples pour optimiser le travail à la maison

Et si on en discutait ?